Histoire de la fresque

Par Monsieur SARRET Jacques, ancien habitant de Pommiers la Placette

Dans l’église de Pommiers, une belle et grande fresque orne le mur de la chapelle latérale nord dédiée à Saint Joseph.

 

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Voici son histoire.

C’est en 1941 que l’abbé PEYROLA, prêtre au petit Séminaire de Voreppe et curé desservant la Paroisse Notre Dame de Pommiers propose aux paroissiens du village de célébrer, le moment venu, le premier centenaire de l’église (construite entre 1840 et 1843 et consacrée en 1844).

Pour marquer cet anniversaire il obtient l’adhésion de ses paroissiens sur un projet de décoration de l’intérieur de l’église comportant la réalisation successive de deux grandes fresques murales et la commande de vitraux pour deux rosaces, l’ensemble devant aboutir à l’embellissement des chapelles latérales de St Joseph et de la Vierge. Le projet est ambitieux, les ressources financières sont à trouver mais – les anciens vous le diront – rien ne peut s’opposer au dynamisme et à l’opiniâtreté de l’abbé PEYROLA. Et ce sont les circonstances particulières de la guerre qui vont permettre la concrétisation d’une partie du projet.

A l’époque, dans notre région, comme dans beaucoup d’autres en France, sont accueillies, voire cachées des personnes, juives pour la plupart. La famille Bonnat, chocolatier à Voiron, prend sous sa protection un couple d’émigrés Hongrois, Michel et Edith Friedman (connus alors sous le nom de Ferrer) et lui trouve entre autres un hébergement au presbytère (emplacement de l’école actuelle de Pommiers la Placette). Michel Friedmann est artiste peintre. La famille Bonnat (Armand et Gaston) propose au Père PEYROLA de confier à cet émigré hongrois, la réalisation de la première fresque et décident de prendre à leur charge son financement en souvenir de leur aïeule, Camille Fayolle, née à Pommiers.

Le sujet de la fresque est arrêté : le mariage de Marie et Joseph, symbole du mariage chrétien. Michel Friedmann (alias Ferrer) s’attaque aux croquis ; il choisit pour modèles des habitants de Pommiers, un prêtre de Voreppe et sa propre femme, Edith ; il se fait aider par des enfants du village pour piqueter le carton qui lui servira de patron (voir le témoignage d’un des enfants). La fresque est achevée dans le courant de l’année 1942 .

L’embellissement des chapelles s’arrête malheureusement là avec le décès accidentel de l’abbé PEYROLA en 1943, victime d’une chute de bicyclette dans la descente vers Voreppe. Reportons nous de nombreuses années plus tard. Nous sommes le 22 mars 2008, veille de Pâques. Quelques habitants de Pommiers, entourant le Père Michel RIBOUR, prêtre responsable de la paroisse Saint Thomas de Rochebrune – dont fait partie la communauté catholique de Pommiers – et Michel BADY maire de Pommiers accueillent à l’église du village deux familles : Monsieur et Madame Félix Bonnat d’une part et Madame Catherine Friedman-Balle, fille du peintre, son époux et leurs deux enfants. Catherine Friedman-Balle n’avait jamais eu l’occasion de venir à Pommiers et de contempler l’œuvre de son père bien qu’elle en eut connaissance par des courriers et croquis qu’elle détenait depuis le décès du peintre.

On imagine facilement l’émotion de cette famille à l’occasion de son passage à Pommiers. Olivier Balle petit fils du peintre, a exprimé avec beaucoup de tendresse et de sensibilité ce qu’il ressentait en reconnaissant sur la fresque les traits de sa grand-mère dans le personnage d’Eve, et en y découvrant, la signature discrète d’artiste de son grand-père (OROS), signature que peu de Pommerats avaient remarquée. Très ému, il concluait le petit mot qu’il rédigeait par les termes suivants : ’…c’était un moment extraordinaire. Merci à tous, les anciens comme les présents pour avoir participé à la protection des familles juives et de mes grands parents. Humblement, merci’. Témoignage d’une fillette de 10 ans, en vacances à Pommiers en 1942. ’En effet, nous allions avec d’autres filles de Pommiers, c’était du temps de l’Abbé PEYROLA, dans la cure : sur une grande table était placé un carton grandeur nature sur lequel le peintre avait agrandi son projet à l’échelle définitive. Nous avions mission de piqueter à intervalles réguliers en suivant les lignes tracées à la sanguine, avec de grosses aiguilles à canevas ou des outils ressemblant qu’on nous avait confiés, et cela, bien sur la ligne. Ensuite le peintre, à l’église, après avoir fait un travail de préparation sur le mur, plaçait ce carton (le ’poncif’) contre le mur et pulvérisait une poudre qui inscrivait le tracé de la fresque. Nous avons aidé au transport de ce carton jusqu’à la chapelle de Saint Joseph, mais ensuite je n’ai jamais vu travailler le peintre. Par contre, je me souviens d’un détail qui m’avait frappé : pour dessiner la tenture, il avait suspendu à une baguette un rectangle de toile grise pas plus grand qu’un demi-torchon et avait simulé l’embrase avec un bout de ficelle ; la baguette était fixée perpendiculairement au mur.

SARRET Jacques